Eden Kunchan

Ils discutaient des cadeaux. Asphodele-chan avait eu une excellente idée en pensant également aux parents. Une écuelle pour la petite, c'était très bien. Il pourrait l'aider à la décorer. Un vase pour la maman. Oui, c'était vraiment parfait. De plus, cela permettrait à son tendre amour de commencer les travaux de potterie qui lui tiennent à coeur. Et puis, vint cette dernière question, qu'offrir au père?

"Si j'étais papa, quel cadeau est-ce que j'aimerais recevoir".

Cette question avait entraîné une espèce de vertige chez Matabei. Il ne se l'était jamais posée. Par réflexe ou habitude, ses traits s'étaient figés pour ne rien laisser paraître des sentiments qui se faisaient jour. C'est moins la seconde partie de la question qui le troublait, que la première. A vrai dire, très vite, son instinct, son coeur, lui avait dicté une réponse: s'il était papa, il n'y aurait plus guère de cadeau qu'il aimerait recevoir. Matabei reprit son souffle pour répondre:

"Hum ... pour Coleen, je pense que je pourrai faire un dessin. L'enfant, sa mère et son père. Une esquisse au pinceau avec quelques couleurs pour figer cet instant unique, celui de la naissance d'une famille."

Sur son visage, un oeil habile pouvait tout de même voir le début d'un sourire au lieu du brouillard qui permet classiquement à Matabei d'éviter d'indiquer ce qu'il pense les rares fois où cela s'avère nécessaire. Il est dit qu'entre -chan et -kun, il ne peut y avoir de secret puisque, tels le yin et le yang, ils se complètent et vivent au même rythme: celui de l'harmonie.

Ce qui n'était que début d'un sourire devint sourire. Il posa sa main sur la sienne pour en caresser doucement le dos.

"Pour la peinture, il faut que je vois cette princesse. Je veux savoir quel chateau lui convient. Et puis, il est des choses qu'il faut voir pour comprendre, même si on peut facilement les imaginer. Il en est ainsi sans doute du regard émerveillé des parents sur cet enfant. Dès que vous serez prête nous y irons. Je vais d'ailleurs de ce pas t'aider à préparer un four et un tour pour votre atelier de poterie. L'argile est idéal par ici, tu vas bien t'amuser".

Il finit ses mots en lui embrassant la main.

Asphodele et Matabei s’étaient séparés pour l’après-midi. Elle était à la source et travaillait la glaise. Il était dans son atelier afin de lui préparer un tour de potier pour qu’elle puisse continuer son travail.

De retour dans leur eden, Matabei s’aperçut que, mine de rien, ses travaux étaient tout de même bien avancés. On pouvait désormais deviner ce qui serait bientôt une passerelle de bois cheminant sur le terrain de la maison à la source. Ce chemin arriverait à un petit pavillon, dont il espérait bien finir de monter la charpente dans la soirée. Les travaux de terrassement étaient quasiment terminés et l’emplacement avait été assaini par un mélange de graviers et de sable. Il ne resterait plus qu’à poser le plancher et à fixer les cloisons, ce qui demanderait tout de même de longues heures de travail.

Contrairement à ce que l’on pouvait croire, le plus difficile n’avait pas été la construction de ce petit pavillon d’une douzaine de tatami. Le travail du bois n’est guère fastidieux quand on a l’habitude. Marier le bois avec la nature nécessite seulement le respect de certaines règles élémentaires, assez faciles à satsifaire en fait: se protéger du nord par une butte; avoir de l’eau au sud pour être heureux; et tout autour de la verdure comme source d’inspiration et de tranquillité. Non, le plus difficile, c’était la préparation des canalisations et la mise en place des bassins. Dompter l’eau n’est pas chose aisée. Fort heureusement, les romains avaient doté Clermont de magnifiques thermes et cela avait permis à Matabei d’apprendre tout ce qu’il devait savoir pour préparer le premier "onsen" privé de tout l'Occident.

Le contact avec la nature, le bruit de l'eau, le souffle du vent dans les feuilles, le chant des oiseaux... En rejoignant, la belle Asphodele, Matabei ne réussit pas à réprimer un large sourire. Il est un état de nature, un état où les choses sont si simples que les mots ne servent à rien. Nous sommes donc faits de glaise et d’eau. Il repensa à son ancêtre et au choc reçu lors de sa première rencontre avec dame Doji. "L’amour est une vague", disait-il, "et je me suis retrouvé face au plus terrifiant des tsunami". "Alors qu’avez-vous fait", lui avait-on demandé, sans jamais qu’il ne réponde à cette question par autre chose qu’un large sourire. Matabei savait désormais ce qu’il avait fait. Tout comme lui, il avait posé ses affaires et il avait plongé au creux de la vague pour se laisser emporter.

Asphodelle rentra joyeuse comme à son habitude depuis qu'elle avait rencontré et qu'elle vivait avec son grand amour.

Elle prépara wok de légumes : carottes, navets, rutabaga, panets, poireaux, pommes de terre...

Celà embaumait la maison. Elle avait acheté pain à Kermor. Il sortait du fournil. L'odeur embaumait la maison. Elle dressa la table. Elle avait cueillit des fleurs qu'elle mis dans un vase avec de l'eau. Elle posa le tout sur la table.

Elle surveillait la cuisson tout en faisant un brin de ménage. Puis, elle prit une feuille et continua son travail de représentante en attendant -kun.

Asphodele se réveilla et trouva le plateau et une grue en papier. Elle l'ouvrit et lu le mot. Elle sourit.

Elle se leva et s'habilla. Elle rangea et fit la vaisselle.

Elle sortit et alla travailler.

Elle passa sa journée dans un champ.

Elle rentra le soir repue, brisée. Elle alla se coucher sans tarder.

Elle se réveilla la première ce matin là. Elle paraissa dans le lit aux côté de son amour. Elle l'observa dormir. Il ressemblait à un ange, son ange.
Elle était bien, elle avait chaud. Leurs corps étaient enlacés l'un dans l'autre ou l'inverse.

Elle finit par se lever et alla préparer le petit déjeuner. Elle coupa une bonne tranche de pain qu'elle beurra avec le beurre qu'elle avait préparé la veille. Elle mis dessus le reste de la confiture de groseilles. Elle pressa des oranges et en fit un jus délectable. En faisant tout ca elle rajouté un ingrédient nécessaire à toute préparation et dont elle avait le secret.

Elle laissa tout sur la table. Elle remonta et déposa ses lèvres sur son front sans le réveiller.

Ellle sortit, cueillit une rose et la déposa sur la table.

Puis elle partit au verger.

Il se réveilla d'excellente humeur, maintenant plus que jamais. La journée s'annonçait magnifique. Au loin, la rivière égayait l'atmosphère de son bruit rassurant. Le soleil était haut dans le ciel et le temps n'était pas trop froid. Il descendit dans la cuisine et ce qu'il y vit n'était pas sans lui rappeler quelque chose. Tout en profitant de cet excellent petit déjeuner, il commença à retranscrire le rêve qui avait suivi le premier rêve:

"Lorsqu'il crut s’éveiller du premier rêve, il était allongé sur son futon. Il n’avait pas immédiatement ouvert les yeux. Ce n'était tout de même pas possible de faire des rêves pareils, se disait-il. Trouver une inconnue dans sa cuisine. En plus, elle était absolument magnifique. Alors qu’il repensait à elle, une odeur inattendue de thé au jasmin l'avait poussé hors de son futon.

Imaginez que vous êtes nu dans votre lit et qu’alors que vous êtes a priori seul chez vous, vous sentiez un délicieux parfum vous chatouiller le nez. Que faites-vous ? Eh bien, vous allez voir ce qui se passe dans votre cuisine. Cette même cuisine, où, la veille au soir, soit dit en passant, vous avez aperçu une superbe jeune femme en train de cuisiner. Comme vous venez juste de vous réveiller et que justement, vous n’avez pas encore bu de café, vous êtes hébété.

Il s'était donc levé pour se diriger, hébété, vers la cuisine. Il traversa tout le pavillon, tout doucement, sur la pointe des pieds, en faisant le moins de bruit possible, pour se retrouver seul dans sa cuisine. Seulement, à la différence de tous les autres matins depuis bien longtemps, quelqu’un avait disposé sur la petite table basse un petit déjeuner : une belle nappe, du jus d’orange pressé, du beurre, de la confiture et des tartines. Alors qu’il s’apprêtait à dévorer tout cela, il trouva un petit mot.

Citation :

Bonjour,

J’espère que vous avez bien dormi. Comme vous vous êtes évanoui dans votre cuisine hier soir, j’ai préféré vous coucher dans votre lit et ne pas vous réveillez ce matin. Passez une bonne journée.

A ce soir,

Elle

Il entendit un bruit étrange. Son cœur venait de quitter sa poitrine. "

Ce passage était toujours aussi amusant à écrire. Matabei se le rappelait encore. La première fois, c'est étrange. Sans qu'il soit vraiment possible de s'y habituer, il avait toutefois appris à mieux comprendre ce qu'il ressentait.

[A suivre ]

La soupe mijotait sur le feu, le couvert était mis. Il avait préparé deux petits origami qui se chamallaient tendrement au milieu de la table. Tout en pensant à sa bien aimée, il reprit la narration de ses rêves d'été.

"[Suite du rêve qui avait suivi le premier rêve]

Donc elle s'appelait Elle.

Elle était passée de la veille au matin du tutoiement au vouvoiement ce qui était d'autant plus surprenant qu'elle n'avait pas hésité à le déshabiller avec de le mettre sur le futon. Que savait-il d'Elle? Elle semblait être un vrai cordon-bleu. Elle avait les clés de son coeur et Elle était d'essence divine. Néanmoins, il ne l'avait jamais vue avant qu'elle ne se matérialise dans sa cuisine. Parce qu'une fille comme Elle, justement, il n'aurait jamais pu l'oublier.

Après avoir fini de manger cet époustouflant petit déjeuner, il s'était dirigé vers la salle de bains pour se laver. Et bien, maintenant, sa salle de bains n'était plus sa salle de bains. Plus du tout. En l'espace d'une nuit, elle était devenue leur salle de bains. Elle y avait installé un nombre impressionnant et incalculable de choses étranges, dont l'utilisation était incompréhensible pour lui. Comme si Elle en avait eu le moindre besoin... Elle lui avait gentiement laissé une minuscule parcelle de libre pour qu'il puisse empiler ses propres affaires.

Le plus bizarre dans tout ça, ce n'était pas tellement la salle de bains. C'était le fait qu'il soit étrangement content. On lui aurait raconté cette histoire, il y a encore une nuit, il aurait hurlé au cauchemar, à la perte d'indépendance, au je-marche-seul, à la tentative d'encouplage manichéen, à la crise de conjugalisme aiguë et de marmottage intempestif.

Maintenant, plus du tout.

Car, il en était sûr, Elle serait là ce soir et il était amoureux d'elle."

Celà faisait deux jours que Aspho travaillait durement dans son champ. Hier, elle l'avait labouré. Et, aujourd'hui, elle a semé.
Elle ne pensait pas que c'était si prenant et si physique même si elle l'avait fait pour d'autres. Le plaisir était là. C'était son champ.

Et puis, maintenant, il y avait son moulin. Oui, elle était meunière. Enfin!

Elle rentra chez eux. se débarbouilla et commança à préparer le repas du soir. Ce soir ce serait leur soirée. Non pas qu'ils n'avaient jamaie eu de soirée à eux mais ce sera une soirée spéciale. Elle voulait fêter tout ce bonheur qu'il lui avait apporté et qu'il lui apporterait encore.

Leur arbre poussait tranquillement.

Elle avait été chercher des baies et pris des légumes du jardin. Elle fit bouillir de l'eau et plonga les légumes dedans.
Assise sur une chaise, elle pluma un poulet. Puis, le mis dans un plat et concocta une recette secrète et le mis dans le four.

Pendant le temps de la cuisson, elle alla se baigner dans la source pour se délasser en tendant une oreille pour la cuisson.

Elle l'attendait...

Il ne tarda pas à rejoindre leur éden. Il faisait si bon sur cette île. La présence de la source d’eau chaude atténuait le froid hivernal, lequel n’était de toute façon pas très sévère cette année. C’était sans doute pour cela que leurs légumes poussaient si bien et que leur arbre prenait racine.

Arrivé chez eux, il la chercha dans la maison et s’aperçut de la chambre située à l’étage qu’elle était en train de se baigner. Ses yeux et son esprit eurent beaucoup de mal à se dégager d’une telle vision tant la sensualité qui se dégageait d’elle était mise en valeur par les volutes de fumées qui naissaient de chacun de ses mouvements.

En passant par la cuisine, il remarqua le poulet qui finissait de rôtir. La cuisson était parfaite. Il le prit et le dépeça soigneusement avant d’y rajouter les légumes et quelques agrumes. Une fois le plateau repas dressé et décoré de quelques origamis espiègles et joueurs s’amusant à grimper le long d’un bouquet de fleurs il se dépêcha de la rejoindre en marchant le long de la passerelle qui traversait le potager.



De là, il arriva au petit pavillon qu’il avait construit à proximité du bassin d’eau chaude.



Il déposa ses sandales à l'entrée, fit glisser le shoji de bois le long du mur pour pouvoir rentrer à l’intérieur du pavillon, où il alluma le brasero et les lanternes. Le repas pourrait attendre quelque temps, pensait-il. Il fallait déjà se mettre en état d’en profiter. Pour ce faire, il ouvrit l’autre shoji afin de se retrouver dans le onsen proprement dit. Une fois lavé et rincé, propre comme un sou neuf, il pénétra à son tour dans la source thermale pour rejoindre son tendre amour qui l'y attendait.

Il glissa jusqu'à elle en se laissant porter par le tourbillon d'eau chaude. L'air légèrement vivifiant les entourait d'un délicat nuage et la nuit, qui commençait à tomber, les enveloppait de son manteau protecteur. Ils étaient seuls au monde.

Si elle pouvait deviner ses pensées, ce qui devait être fort probable, arriverait-elle à savoir qu'un onsen est un endroit sacré où on vient se purifier, se débarasser de tous les tracas de la journée pour renaître une nouvelle fois, tel un phenix.

Sa nage s'arrêta à l'endroit exact où elle avait ses lèvres, comme une réponse à toutes les questions posées. "Oui, mon amour. J'ai passé une très bonne journée, laquelle n'est rien en comparaison de la soirée qui s'annonce à tes côtés."

Le repas était délicieux, un adjectif qui résonnait encore et encore dans son esprit. Tout était délicieux avec elle. Ils mangèrent avec appétit en riant d'eux mêmes. Quand ce fut fini, Matabei se mit à ses côtés et commença à l'habiller. Cela allait prendre un peu de temps parce que de tels habits allaient lui sembler étrange. Il lui peigna longuement les cheveux avant de les réunir dans un chignon subtil retenu par plusieurs baguettes. Elle fit de même avec lui en une espèce de curieux cérémonial dont elle saisissait déjà les principes. C'est au son des sandales de bois sur la passerelle qu'ils se dirigèrent vers l'autel situé dans les bois de Clermont.

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https://clermont-champagne.niceboard.com/habitations-f9/le-pavillon-de-the-et-son-jardin-b3-t88-180.htm#8719